Longtemps épargnée par les catastrophes naturelles, la Belgique voit aujourd’hui son climat évoluer rapidement sous l’effet du réchauffement global. Les feux en milieu naturel, les vagues de chaleur, la sécheresse et les inondations deviennent des risques croissants, aux impacts considérables sur la société et les services d’urgence. Focus sur la province de Luxembourg et les enseignements du nouveau Centre d’analyse des risques liés au changement climatique (CERAC).

Une pression accrue sur les services de secours

Jusqu’à récemment, la Belgique n’était pas considérée comme un pays à risque en matière de feux de forêts. Pourtant, les effets combinés du réchauffement climatique – hausse des températures, sécheresses prolongées, modification des précipitations – rendent ce type d’événements de plus en plus fréquent. Avec près d’un tiers des forêts belges sur son territoire, la province de Luxembourg est particulièrement vulnérable aux feux en milieu naturel.

Le Centre de crise national (NCCN) a classé les feux en milieu naturel parmi les risques à forte probabilité. Cette évolution se traduit par une pression grandissante sur les services de secours. En France, les interventions liées au changement climatique ont bondi de 3.000 jours/homme par an (2012-2022) à plus de 56.000 en 2024. En province de Luxembourg, le nombre moyen d’interventions journalières de la Zone de Secours Luxembourg est passé de 73 à 84 entre 2022 et 2024.

Le CERAC : mieux comprendre pour mieux anticiper

Face à ces nouvelles menaces, le gouvernement belge a mis en place, en janvier 2025, le Centre d’analyse des risques liés au changement climatique (CERAC). Cette structure indépendante et interdisciplinaire a été créée à la suite des inondations de juillet 2021. Sa mission est de fournir aux décideurs politiques des analyses scientifiques solides pour mieux préparer le pays aux impacts climatiques.

Parmi les projections et constats du CERAC :

  • Une augmentation moyenne des températures entre +2,6 et +3,5 °C d’ici la fin du siècle
  • Une accentuation de la saisonnalité des précipitations : baisse des pluies estivales, hausse des précipitations hivernales, souvent sous forme d’épisodes intenses
  • La diffusion de messages de prévention ciblés, par le biais de la Fédération, adaptés aux spécificités du secteur
  • Des vagues de chaleur beaucoup plus fréquentes et intenses : dans le scénario inchangé (RCP 8.5), le nombre de jours de canicule pourrait passer de 4 par an actuellement à plus de 50 en 2100, avec un impact renforcé en zones urbaines
  • Une élévation du niveau de la mer à la côte belge de 60 à 90 cm d’ici 2100, avec un scénario pessimiste atteignant 2 mètres
  • Un bilan hydrique estival négatif, induisant un risque accru de pénurie d’eau et de sécheresse.

Des conséquences économiques et sociales majeures

Une étude menée en 2020 par VITO, EcoRes et Kenter, à la demande de la Commission nationale Climat, a permis de chiffrer l’impact socio-économique du changement climatique en Belgique. Les résultats sont édifiants :

  • Les pertes économiques dues aux événements climatiques (chaleur extrême, sécheresse, inondations) pourraient atteindre près de 9,5 milliards d’euros par an en 2050, soit environ 2 % du PIB national
  • Les gains associés à des hivers plus doux sont estimés à environ 3 milliards d’euros par an (0,65 % du PIB), mais ne compensent pas les pertes globales
  • La mortalité estivale due aux vagues de chaleur pourrait s’élever à 950 décès par an dès 2050, et jusqu’à 1.900 à la fin du siècle
  • Les pertes de productivité du travail liées à la chaleur pourraient coûter à la Belgique entre 610 millions et 9 milliards d’euros par an, selon les années et les scénarios
  • Les rendements agricoles pourraient baisser de manière significative, jusqu’à –35 % pour certaines cultures (pommes de terre, maïs), avec une perte annuelle estimée à 606 millions d’euros pour l’ensemble du secteur agricole.

Se préparer, s’adapter, agir

Les données sont sans appel : le changement climatique transforme profondément les conditions de vie, de production et d’organisation des secours en Belgique. Il ne s’agit plus d’une menace à long terme, mais d’une réalité à laquelle il faut répondre dès aujourd’hui.

Face à cette situation, la Belgique dispose désormais d’un outil stratégique avec le CERAC. Mais au-delà de l’analyse, c’est l’ensemble des politiques publiques – sécurité civile, urbanisme, environnement, santé, économie – qui devra s’adapter, afin d’anticiper au mieux les impacts à venir.

Pour en savoir plus sur le CERAC et ses missions :

www.cerac.be